Rattrapée par la tradition du jambon (04/04/2015)
Dimitri Brosset, Joana et Maia Houyou (de gauche à droite) sur le stand à la Foire au jambon. ©J.M.
Maia Houyou est l'une des deux femmes charcutiers-salaisonniers présentes parmi les 22 installés à la Foire au jambon, à Bayonne. Il y a huit ans, elle a changé de voie professionnelle pour rejoindre l'entreprise familiale de Mauléon
Sous le grand chapiteau blanc, dressé sur le mail Chaho-Pelletier, les visiteurs de la Foire au jambon, à Bayonne, se pressent et déambulent de stand en stand. Qui observe les jambons suspendus, qui goûte une fine lamelle tout juste tranchée ou se laisse séduire par de la saucisse sèche, les narines chatouillées par cette odeur caractéristique de salaison.
Pour cette édition 2015 de la Foire au jambon, 22 charcutiers-salaisonniers ont répondu présent et plutôt d'une voix toute masculine puisque seulement deux femmes figurent sur la liste. La salaison, un métier d'homme ? "Non", répond dans un large sourire Maia Houyou, même s'il y a quelques années, elle le pensait un peu.
" Il y a huit ans, j'ai tout abandonné pour me former et travailler avec mes parents", confie celle qui auparavant travaillait dans un magasin de bijoux de Bayonne. Issue d'une famille de charcutiers de Mauléon depuis quatre générations, Maia Houyou a été rattrapée, peu à peu, par cet univers.
"J'ai vécu en Allemagne, il y a quelques années, et quand je recevais des colis avec plein de bonnes choses tout le monde me parlait de ce métier, des produits. Moi, je leur répondais que c'était un travail plutôt masculin, très physique"', poursuit-elle.
Le moment ou jamais
Et pourtant, celle qui a suivi la voie des études universitaires classiques a pourtant décidé de faire un virage à 180°c dans sa carrière. "Je me suis dit, tu tentes. C'est le moment ou jamais. Il vaut mieux un échec que des regrets", affirme Maia Houyou qui s'est formée auprès de la Chambre de métiers des Pyrénées-Atlantiques pour décrocher son CAP de charcutier, mention traiteur. "Ça reste un métier très physique, il y a des choses que je ne peux pas faire mais je pense que les femmes ont toute leur place. C'est avant tout un travail d'équipe et familial", détaille la trentenaire dans sa tenue noire, les cheveux retenus en arrière, laissant apparaître ses boucles d'oreille.
La réalisation du boudin, l'élaboration des saucisses ou pâtés, la surveillance des jambons et la confection de bien d'autres produits remplissent les journées de Maia Houyou, aidée par ses parents, son conjoint, sa soeur ou encore Christian, présents à leurs côtés depuis 23 ans. "Nous sommes une petite structure et j'aime ce côté à la bonne franquette, très chaleureux, reprend-elle. Ce qui me plaît dans ce métier, c'est l'idée de partir de quelque chose de brut, que l'on transforme pour obtenir un bon produit. On leur donne notre touche."
Maia est également séduite par l'approche à contre-courant de son métier. Dans un monde où tout va très vite désormais, il faut compter de longues heures pour créer du boudin et le temps file au rythme des mois pour aboutir à un parfait jambon sec. "Il faut être bosseur et patient", sourit la pétillante jeune femme qui concède être, à l'inverse, toujours en mouvement.
"On apprend tout le temps"
La famille Houyou est présente à Mauléon et Bayonne (1) et produit en moyenne, 250 jambons à l'année, dans un "esprit familial". Un esprit qui séduit aussi à travers ses spécialités comme les lukhainka, des saucisses sèches, qui en version miniature sont surnommées les "Carambar salés" par les enfants de Mauléon, qui poussent la porte de leur boutique.
A la Foire au jambon, Maia Houyou, aidée de son compagnon Dimitri Brosset et de sa soeur Joana Houyou, présente leur savoir-faire en matière de salaison et de jambon de Bayonne. "Nous avons l'IGP(2) depuis deux ans seulement. C'est la seconde fois que nous sommes présents, ici, à la Foire et je suis toujours aussi impressionnée, explique Maia. On voit ce qui plait aux gens, on discute avec les autres, on prend des conseils. C'est toujours bon d'avoir les retours des autres. On apprend tout le temps."
De son ancienne vie, Maia Houyou ne regrette rien. Son histoire passait par la case salaison. Et pour achever de vous convaincre, elle lâche cette anecdote : "Quand je rentre dans le séchoir, c'est…". Elle s'interrompt mais ses yeux pétillent comme ceux des enfants le matin de Noël, au pied du sapin.
(1) Haitia, boucherie Houyou, 7 av. Alsace-Lorraine, à Mauléon et 2 rue des Carmes à Bayonne. Tél. 05 59 28 03 28.
(2) Indication géographique protégée.
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